Les troubles du neuro développement et les addictions, par la Dr Elodie Zante

Qu’est-ce qu’un trouble du neurodéveloppement ? Quelle est la différence avec un neurodéveloppement typique ? Et, une addiction, qu’est-ce que c’est ? En existe-t-il plusieurs types ? Quels sont les mécanismes qui la provoquent ?

C’est d’abord à ces questions que le docteur Elodie Zante, psychiatre et cheffe de clinique assistante au Centre Hospitalier Le Vinatier, va répondre. Elle liera ensuite troubles du neurodéveloppement et addiction, avant d’élargir sa présentation sur les perspectives de recherches à ce sujet.

Les Troubles du spectre de l’autisme (TSA) et le Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) sont des troubles du neurodéveloppement (TND) marqués par les difficultés sociales et un fonctionnement relativement « atypique » aussi bien cognitif que social. Plusieurs profils cliniques sont décrits incluant des troubles de la sensorialité, du traitement de l’information, des troubles moteurs et des degrés variables de variations neurocognitive vis-à-vis de la population générale. La prévalence des TSA en population générale est de 1% , celle du TDAH est d’environ 5 % deux avec un risque accru pour le sexe masculin pour ces deux TND qui peuvent fréquemment être associés.

Dans la population avec TSA sans trouble du développement intellectuel (TDI), des conduites dites de « camouflage » ont été décrites. Celles-ci constituent des stratégies de compensation fréquentes (conscientes ou non) dans ces populations avec TND, elles permettent aux personnes concernées de réduire l’expression de leurs symptômes malgré des difficultés d’interactions sociales parfois importantes. Bien qu’elles facilitent souvent l’adaptation sociale des personnes concernées, elles peuvent impacter négativement leur santé mentale et favoriser les conduites addictives. De plus en plus de travaux vont dans le sens de vulnérabilités vis-à-vis des addictions être différentes dans cette population avec TND avec notamment un sex ratio plus équilibré qu’en population générale. Ces comorbidités addictives pourraient avoir impact délétère sur leur qualité de vie ce qui justifierait le développement d’accompagnements thérapeutiques spécifiques adaptés à ces populations.

Au travers de cette présentation de la littérature scientifique récente concernant les personnes avec TND sans TDI, nous montrerons que bien le lien entre TDAH et addiction est bien décrit depuis de nombreuses années, pour le TSA, les résultats des études sont actuellement inconstants. Même s’il est certain que l’association d’un diagnostic de TSA et de TDAH majore le risque d’addictions, les spécificités épidémiologiques de cette population au double diagnostic restent encore peu connues. La majorité des études ne répertorient que le champ des addictions avec produits (majoritairement alcool, tabac et cannabis) et vont majoritairement dans le sens d’une faible consommation de toxiques dans la population avec TSA bien que certaines cohortes concluent au contraire à un risque accru. Enfin nous soulignerons, qu’il existe des facteurs de risque génétique et environnementaux partagés entre TSA, TDAH et addictions qui permettrait d’expliquer l’incidence accrue des addictions chez les apparentés du premier degré des personnes avec TSA et TDAH.

Bien que ces données de la littérature apportent un éclairage sur la clinique des TND et qu’elles donnent des perspectives intéressantes aussi bien clinique que scientifique, elles restent encore trop peu nombreuses, ont des résultats trop variables et ne rendent pas compte de la problématique réelle dans le champ des TND où l’expression des addictions semble se concentrer sur les aspects comportementaux

Après la présentation, une discussion autour de ces résultats qu’il faut les considérer avec précaution et des enjeux qu’ils mettent en évidence sera proposée aux participants.